Dans un communiqué de presse daté du 5 juillet 2016, la Commission Européenne propose « d’inclure les plateformes de change de monnaies virtuelles et les fournisseurs de services de portefeuille de stockage dans le champ d’application de la directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux ». Par conséquent « ces entités seront tenues d’effectuer des contrôles liés à la vigilance à l’égard de la clientèle lors de l’échange de monnaies virtuelles contre des monnaies réelles, ce qui mettra fin à l’anonymat associé à ce type d’échanges ».
Notons que toutes les plateformes de change qui ont pignon sur rue en France (Paymium, Coinhouse, Mineoncloud…) pratiquent des mesures de KYC (Know Your Customer) et ne sont donc pas concernées par les changements induits par la décision de la Commission. Quant aux « services de portefeuille de stockage » cela ne concernera logiquement que les « bitcoin banks », c’est à dire les services centralisés qui détiennent les bitcoins (les clés) de leurs clients et qui bien souvent sont également des exchanges (comme Coinbase, Coinapult, Xapo et Circle). Les autres applications ne sont que des outils permettant aux utilisateurs de communiquer avec le réseau Bitcoin.
Commission européenne – Communiqué de presse
Strasbourg, le 5 juillet 2016La Commission renforce les mesures de transparence afin de lutter contre le financement du terrorisme, l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux
La Commission a adopté aujourd’hui une proposition visant à renforcer davantage les règles de l’UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux afin de combattre le financement du terrorisme et d’accroître la transparence en ce qui concerne les bénéficiaires effectifs d’entreprises et de fiducies («trusts»).
La Commission Juncker a fait de la lutte contre l’évasion fiscale, le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme l’une de ses priorités. Les modifications proposées aujourd’hui permettront de réagir face aux nouveaux moyens de financement du terrorisme, d’accroître la transparence pour combattre le blanchiment de capitaux et de contribuer à renforcer la lutte contre l’évasion fiscale.
Cette proposition de la Commission est la première initiative prise dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme de février 2016 et elle s’inscrit également dans une démarche plus large visant à accroître la transparence fiscale et à lutter contre les pratiques fiscales abusives. C’est pourquoi la Commission présente également, en parallèle, une communication en réponse à la récente divulgation des «Panama Papers».
Frans Timmermans, premier vice-président, a déclaré à ce propos: «Les propositions présentées aujourd’hui aideront les autorités nationales à identifier les personnes qui dissimulent leurs avoirs en vue de commettre des actes criminels tels que le terrorisme. Les États membres seront en mesure d’obtenir et de partager des informations capitales sur les bénéficiaires effectifs d’entreprises ou de fiducies et sur les utilisateurs de monnaies virtuelles et de cartes prépayées. La publication des informations relatives aux bénéficiaires effectifs des entreprises et des fiducies devrait également avoir un effet dissuasif puissant auprès des fraudeurs fiscaux potentiels.»
Věra Jourová, commissaire européenne chargée de la justice, des consommateurs et de l’égalité des genres, a déclaré quant à elle :
«Nous proposons aujourd’hui des règles de transparence plus strictes afin de priver les terroristes de leurs sources de financement et de renforcer la lutte contre le blanchiment de capitaux et l’évasion fiscale. La mise à jour de la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux permettra d’éviter les vides juridiques en Europe et d’empêcher ainsi que les terroristes, les criminels ou quiconque n’exploite les règles d’imposition pour financer leurs activités. Une meilleure coopération pour lutter contre ces problèmes fera toute la différence».
L’adoption, en mai 2015, du quatrième train de mesures contre le blanchiment a représenté une étape importante dans l’amélioration de l’efficacité des efforts déployés par l’UE dans la lutte contre le blanchiment de capitaux provenant d’activités criminelles et contre le financement d’activités terroristes. Il établit des normes strictes pour empêcher le blanchiment de capitaux, notamment l’obligation pour les États membres de mettre en place des registres nationaux des bénéficiaires effectifs des entreprises et de certains «trusts». Les États membres se sont engagés à mettre ce train de mesures en œuvre au plus tard à la fin de l’année 2016, plus rapidement que ce qui avait été initialement prévu.
Lutter contre le financement du terrorisme
Comme annoncé dans le plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme, la Commission propose des modifications visant à empêcher que le système financier ne soit utilisé à des fins de financement d’activités terroristes :
Renforcer les pouvoirs des cellules de renseignement financier de l’UE et faciliter la coopération entre elles: le champ des informations accessibles aux cellules de renseignement financier sera élargi et elles auront accès aux informations contenues dans les registres centralisés des comptes bancaires et des comptes de paiement ainsi que dans les systèmes centraux de recherche de données, que les États membres devront mettre en place pour identifier les titulaires de comptes bancaires et de comptes de paiement ;
Agir sur les risques de financement du terrorisme liés aux monnaies virtuelles: afin d’empêcher les utilisations abusives de monnaies virtuelles à des fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, la Commission propose d’inclure les plateformes de change de monnaies virtuelles et les fournisseurs de services de portefeuille de stockage dans le champ d’application de la directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux. Ces entités seront tenues d’effectuer des contrôles liés à la vigilance à l’égard de la clientèle lors de l’échange de monnaies virtuelles contre des monnaies réelles, ce qui mettra fin à l’anonymat associé à ce type d’échanges ;
Contrer les risques liés aux instruments prépayés anonymes (par exemple, les cartes prépayées): la Commission propose également de réduire au minimum le recours aux paiements anonymes au moyen de cartes prépayées, en abaissant les seuils en-dessous desquels une identification n’est pas requise de 250 € à 150 € et en élargissant les exigences relatives à la vérification de l’identité des clients. Le principe de proportionnalité a été pris en considération et une attention particulière a été accordée à l’utilisation de ces cartes par les citoyens vulnérables sur le plan financier ;
Appliquer des contrôles plus stricts aux pays tiers à risque: conformément aux dispositions de la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux, la Commission propose d’harmoniser la liste des contrôles applicables aux pays dans lesquels la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme présentent des lacunes. Les banques devront procéder à des contrôles supplémentaires («mesures de vigilance») sur les flux financiers en provenance de ces pays. La liste de pays, établie sur le modèle de la liste du GAFI, sera, pour des raisons procédurales, formellement adoptée le 14 juillet.
Renforcer les règles de transparence pour empêcher l’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux
La proposition présentée aujourd’hui renforcera les mesures introduites par la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux au moyen des modifications suivantes :
Accorder au public un accès illimité aux registres des bénéficiaires effectifs: les États membres rendront publiques certaines informations contenues dans les registres des bénéficiaires effectifs des sociétés ou «trusts» liés à des activités commerciales. Des informations sur tous les autres «trusts» figureront dans les registres nationaux et seront mises à la disposition des parties qui font valoir un intérêt légitime. Les bénéficiaires effectifs qui possèdent 10 % d’une société présentant un risque d’être utilisée à des fins de blanchiment de capitaux et de fraude fiscale seront inscrits dans les registres. Le seuil reste fixé à 25 % pour toutes les autres sociétés.
Mettre en relation les registres : la proposition prévoit l’interconnexion directe des registres pour faciliter la coopération entre les États membres.
Étendre le champ des informations accessibles aux autorités: la Commission a proposé que les comptes existants et nouveaux fassent obligatoirement l’objet de contrôles liés à la vigilance. Cette mesure empêchera que les comptes qui sont potentiellement utilisés à des fins d’activités illicites échappent à la détection. Les sociétés et «trusts» passifs, tels que ceux qui ont été mis en évidence par les «Panama Papers», feront également l’objet de contrôles plus rigoureux et de règles plus strictes.
Contexte :
La quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux a été adoptée le 20 mai 2015. La Commission européenne, dans son plan d’action contre le financement du terrorisme, a enjoint les États membres d’avancer la date de transposition effective de la directive à la fin de l’année 2016.
Les modifications présentées aujourd’hui pour répondre à la fois aux questions du financement du terrorisme et de la transparence sont ciblées et proportionnées afin d’apporter certaines modifications urgentes au cadre existant. La Commission encourage les États membres à prendre en considération les modifications ciblées proposées aujourd’hui dans la transposition de la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux.
Les propositions d’actualisation des règles en vigueur seront adoptées par le Parlement européen et le Conseil statuant conformément à la procédure législative ordinaire.
En ce qui concerne la liste de l’UE des pays tiers à haut risque dont les dispositifs de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme présentent des lacunes stratégiques, la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux prévoit que la Commission adopte une telle liste trois fois par an. La Commission tiendra compte des travaux réalisés au niveau international par le groupe d’action financière. L’UE continuera de coopérer dans tous les domaines politiques pertinents avec les juridictions concernées, notamment au moyen de la coopération au développement, l’objectif ultime étant qu’elles soient mises en conformité et puissent être retirées de la liste. La liste est un acte délégué qui sera également présenté au Conseil et au Parlement européen dans le cadre de la procédure habituelle.
Ces deux initiatives s’inscrivent dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme adopté par la Commission le 2 février 2016.
Pour de plus amples informations :
– Modification de la quatrième directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux.
– Q&R
– Fiche d’information