Monnaies complémentaires et bitcoin à l’aune de la TVA

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Dans un article intitulé « Monnaies complémentaires et monnaies cryptées à l’aune de la TVA », Pascal Ordonneau, ancien dirigeant de la banque HSBC, s’étonne des efforts et des « finesses juridiques » déployés par la Cour de Justice Européenne pour exonérer de TVA les opérations de change en bitcoins et déplore l’absence de telles dispositions pour les monnaies dites « locales », « complémentaires » ou « solidaires ».

« N’est-il pas étonnant que pareil déferlement de finesses juridiques n’ait jamais porté sur les monnaies complémentaires ? » – Pascal Ordonneau.

Pour répondre à cette question je risque trois hypothèses :

1. Perçues comme « solidaires » voire « d’utilité publique », ou tout simplement « insignifiantes », les monnaies complémentaires traditionnelles n’ont peut-être jamais intéressé les administrations fiscales européennes. En l’absence de litige – comme celui qui opposait bitcoin.se au fisc suédois – nul besoin d’une décision de justice, de directive européenne ou de texte législatif.

2. La taxation des opérations en bitcoins sont difficiles à mettre en oeuvre et présenteraient des risques de fraude. En juillet 2014, le ministre de finance Michel Sapin s’était en effet prononcé en faveur d’un non-assujettissement des bitcoins à la TVA au niveau européen, en raison justement de ces risques de fraude qui seraient liés « au caractère remboursable de la TVA sur ces actifs immatériels. »

3. Les monnaies dites « complémentaires » (ou « locales », ou « solidaires ») sont généralement circonscrites : une ville, une communauté de communes, un département, et sont émises par une autorité centrale (association, collectivité locale…). Bitcoin est une monnaie déterritorialisée (apatride diront les uns, universelle répondront les autres). Ne sortant ni des coffres de la BCE, ni d’un serveur en Californie, les bitcoins sont inscrits dans le nuage de leur réseau et s’acquièrent le plus souvent en ligne sur un marché concurrentiel. Soumettre la plateforme bitcoin.se à la TVA c’était la condamner et bloquer le développement de toute activité de change Couronne suédoise/bitcoin en suède sans pour autant empêcher les internautes suédois d’acheter des bitcoins sur des plateformes étrangères. Plus largement, soumettre les pays européens à une TVA sur ce nouveau type d’actif, ce serait tuer une activité naissance pour seul profit de plateformes étrangères qui ne sont pas soumises aux mêmes contraintes.