Traduction d’un fil Twitter de Patrick Hansen, Directeur Stratégie et développement chez Unstoppable Finance.
Les deux réglementations « crypto » européennes les plus importantes à ce jour, MiCA et TFR, sont sur le point d’être finalisées d’ici fin juin. Elles ont d’énormes implications pour le marché des cryptos dans l’UE et au-delà.
Projet de loi MiCA
Le dernier trilogue politique entre les trois principales institutions de l’UE (Conseil/Parlement/Commission) aura lieu jeudi prochain, le 30 juin. Les grandes questions ont presque toutes été réglées. Quelques sujets ouverts restent :
1. Les NFTs
Doivent-ils être dans ou hors du champ d’application de MiCA ? La Commission veut les inclure, arguant la protection des consommateurs, le Conseil et le Parlement étaient tout d’abord contre, mais ils semblent désormais avoir accepté la proposition de compromis de la Commission. Le résultat probable est un compromis où les émetteurs de NFT sont pour la plupart exemptés, mais les entreprises (places de marché, etc.) fournissant des services sur les NFT ne le seront pas. Ils auront besoin d’une licence CASP [Crypto Asset Services Provider]. Il s’agit d’une extension de dernière minute du champ d’action de MiCA.
2. Les stablecoins
Les principales dispositions sont bouclées :
– aucune exemption pour les stablecoins algorithmiques
– des exigences réglementaires élevées pour les émetteurs d’EMT (e-money-tokens) et d’ART (asset-referenced-tokens)
– Pas de rendement autorisé pour les CASP proposant des stablecoins
– MiCa permet aux autorités de l’UE d’interrompre l’émission de stablecoins s’ils sont utilisés significativement pour les paiements.
Seuls aspects encore à discuter :
– les seuils techniques exacts pour cette utilisation « significative »,
– l’autorité qui sera chargée de cette surveillance.
3. La DeFi
Bonne nouvelle : Après de longues négociation, la « vraie » DeFi sera maintenue hors du champ d’application de MiCA. Mais la commission publiera un rapport séparé en 2023 et lancera un projet pilote de « supervision de la DeFi ».
4. l’impact environnemental des cryptos
Contrairement à ce qu’affirment certains médias, l’interdiction de Bitcoin n’est heureusement plus d’actualité. Cependant, il y aura des exigences de divulgation complète (spécifiées par l’ESMA) des actifs numériques pour lesquels les CASP fournissent des services (par exemple BTC).
Principaux sujets ouverts pour les dernières négociations :
– les dispositions AML à inclure dans MiCA
– les délais de mise en œuvre (12 ou 18 mois) pour les CASP et les émetteurs
– le cadre de surveillance précis
Les négociateurs pensent conclure d’ici fin juin. Le compromis adopté fera ensuite l’objet d’un vote formel en plénière au Parlement avant l’entrée en vigueur de MiCA.
Le règlement TFR [1]
Ce règlement est plus controversé et pourrait prendre plus de temps (rappelez-vous, il s’agit des fameux « portefeuilles non hébergés »). Tout d’abord, voilà un petit récapitulatif de ce qui a été décidé :
– il n’y aura pas de seuil à 1000€ pour l’application des règles AML, donc tous les transferts de cryptomonnaies tomberont sous la coupe du règlement TFR.
– Les transferts de pair à pair (wallet à wallet) ne sont pas dans le champ d’application de ce règlement.
Alors qu’est-ce qui fait encore débat ?
1. Le contrôle des « portefeuilles non hébergés ». Le Parlement est favorable à l’obligation pour les CASP d’identifier leur homologue même « non hébergé » lors d’une transaction. Heureusement, le Conseil et la Commission sont contre cette disposition, pour des raisons pratiques (difficultés du contrôle) et économiques. Le Conseil suggère plutôt une approche basée sur les risques conformément à la demande des allemands. Les CASP devraient traiter le risque AML sur la base de l’analyse de la blockchain et prendre des mesures en fonction du résultat. C’est aussi une demande du secteur lui-même. Mais il reste à voir si le Parlement européen sera prêt à abandonner sa résolution lors des négociations finales.
2. L’obligation pour les CASP de signaler les transferts supérieurs à 1000 € reçus de « portefeuilles non hébergés » aux autorités. Le Conseil n’est pas favorable, mais pourrait faire des compromis.
3. La « liste noire »
Le Conseil n’est pas convaincu par la demande du Parlement d’établir une liste noire des CASP à risque (ou illégaux) des pays tiers. Le Conseil propose plutôt d’inclure au règlement MiCa une liste des CASP agissant illégalement au sein de l’UE.
Contrairement à MiCA, il n’est pas certain qu’un accord soit trouvé d’ici fin juin, car le Parlement n’est actuellement pas disposé à abandonner ses exigences qui conduiraient à la mise en œuvre de la Travel Rule du GAFI la plus stricte au monde. Les négociations se poursuivront peut-être sous la présidence tchèque du Conseil au 3e et au 4e trimestre.
Pourquoi ces deux réglementations sont-elles essentielles pour le secteur ?
Parce que l’UE est (surprise !) la première grande juridiction à mettre en place un cadre réglementaire complet pour la crypto. Semblables au GDPR, ces règles pourraient établir des normes mondiales et affecteront les réglementations aux États-Unis et au-delà.
Source : https://twitter.com/paddi_hansen
[1] TFR – pour « Transfer of Funds Regulation » – est le règlement qui définit les informations qui doivent être transmises entre entités financières lorsque des fonds circulent. L’objectif affiché étant d’améliorer leur traçabilité au niveau mondial.