Hier, le 31 octobre 2025, l’Assemblée nationale a adopté par 163 voix contre 150 un amendement au projet de loi de finances. S’il survit au passage au Sénat et à la commission mixte paritaire, ce texte aura des conséquences notables pour les détenteurs de patrimoine, et particulièrement pour certains bitcoiners.
Déposé par le député MoDem Jean-Paul Mattei et ses collègues, l’amendement n° I-3379 prétend transformer l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) en « Impôt sur la Fortune Improductive », englobant tous les actifs qui ne contribueraient pas, selon cette même assemblée, « au dynamisme économique ou à la transition écologique ».
Cet amendement a été ensuite corrigé par un sous-amendement, également adopté, qui annule le relèvement du seuil d’entrée, initialement fixé à 2 millions d’euros, pour le faire revenir au seuil de 1 300 000 € prévu par l’actuel Impôt sur la Fortune Immobilière.
Cette nouvelle taxe concernerait :
- Les biens meubles corporels : Objets précieux, œuvres d’art, meubles meublants, voitures de collection, yachts, avions, pièces de monnaie rares, et tout autre bien mobilier tangible de luxe ou non productif.
- Les biens immobiliers « improductifs » : Tous les biens immobiliers non affectés à une activité professionnelle et ne répondant pas aux critères d’exonération (par exemple, non loués à bail pour une durée d’au moins 12 mois avec loyer plafonné et classe énergétique A à D).
- Les sommes, rentes et valeurs d’assurance-vie non productives : Liquidités, placements financiers assimilés, et assurances-vie non placées en unités de compte dynamiques (excluant celles mentionnées à l’article L. 131-1 du Code des assurances, comme les fonds en actions ou immobilier productif).
- Les placements financiers assimilés : Tout actif financier dormant ou non investi dans des unités de compte productives (par exemple, comptes courants excédentaires ou obligations non qualifiées).
- Les actifs numériques tels qu’ils sont définis dans l’article L54-10-1 du code monétaire et financier.
Les deux textes instituent ainsi un taux unique de 1 % sur la fraction de la valeur nette taxable excédant 1 300 000 €. Pour la première fois, les bitcoins entrent dans l’assiette de l’IFI en tant que biens « improductifs » par nature.
Selon l’amendement, la valeur de vos bitcoins serait appréciée à la valeur de marché au 1er janvier de l’année d’imposition (art. 964 CGI). Pour l’IFI 2026 (déclaration au printemps 2027), ce serait donc le cours du Bitcoin au 1er janvier 2026 qui primerait – indépendamment de vos achats ou ventes antérieurs. En cas de litige sur cette évaluation, l’administration pourrait exiger un rapport d’expert.
Selon le sous-amendement, c’est donc la fraction du patrimoine net taxable supérieure à 1 300 000 € qui serait taxée. Mais si vos bitcoins font partie d’un portefeuille plus large (immobilier + liquidités), ils pourraient vous faire basculer par-dessus la barre.
Notons également que la déclaration serait obligatoire via le formulaire 2042-IFI, avec annexe pour les comptes étrangers ou wallets. Si vous avez délégué la garde de vos fonds à un PSAN, ce tiers transmettra les informations qu’il détient à l’administration fiscale.
Pour entrer en vigueur, le texte devra d’abord être validé par le Sénat et à la commission mixte paritaire. La validation par le Sénat devrait être acquise puisque, en janvier 2025, les sénateurs avaient déjà adopté un projet de loi similaire (rejeté à l’époque par l’Assemblée Nationale). Pour autant, un accord global sur le projet de loi de finances reste incertain.
Notons que l’amendement a majoritairement été adopté grâce à une alliance hétéroclite réunissant majoritairement le RN, le PS, le MoDem et les députés du groupe centriste LIOT.
Sources
Amendement : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/1906A/AN/3379.pdf
Sous amendement : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/amendements/1906A/AN/3910.pdf



