Par cette dernière, la plus haute juridiction administrative française annule la partie de l’instruction fiscale soumettant les gains occasionnels tirés de cryptomonnaies au barème progressif de l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC). Ces gains seront donc soumis au régime des plus-values sur biens meubles (PVBM) prévoyant un taux forfaitaire d’imposition et d’intéressantes exonérations. Cette décision est d’application immédiate et rétroactive. Les plus-values réalisées en 2017 pourront donc en bénéficier.
Les bonnes nouvelles
Le taux : Le régime des PVBM prévoit un taux forfaitaire d’imposition de 19 % auquel il faut ajouter 15,5 % de prélèvements sociaux pour 2017 et 17,2 % pour 2018. Soit un taux global de 34,5 % pour 2017 et de 36,2 % pour 2018.
Les exonérations : Les gains occasionnels pourront bénéficier d’une exonération totale des plus-values tirées de cessions inférieures à 5 000 € et d’un abattement progressif fonction de la durée de détention des cryptos cédées.
Les moins bonnes nouvelles
En revanche, cette décision pourrait entraîner certains effets défavorables :
Le taux : Le taux forfaitaire pourrait, pour certains contribuables à faibles revenus, excéder le taux global qui aurait résulté de l’application du régime BNC (notamment du micro). Exemple : Un salarié percevant 1 500 euros nets par mois et ayant réalisé une plus-value en cryptoactifs de 6 000 euros aurait payé un peu moins de 2 700 euros d’impôt en BNC alors qu’il devra payer près de 3 000 euros d’impôt sous le régime des PVBM.
Les BIC : Pour éviter un recours trop fréquent aux exonérations (en multipliant les cessions à moins de 5 000 euros), le juge pourrait se montrer plus sévère quant à l’appréciation du caractère habituel des gains tirés de cryptos. En effet, les gains habituels resteront bien soumis au régime BIC (à un taux de prélèvement global pouvant aller jusqu’à plus de 60 %). Pour rappel, les gains peuvent être qualifiés d’habituels en raison de leur fréquence mais également de leur montant, dès lors que les cryptoactifs sont acquis dans l’intention de les revendre. Ainsi, le régime des PVBM risque de s’appliquer de manière marginale.
Les moins-values : Sous le régime des PVBM, les moins-values considérées comme occasionnelles ne pourront plus être reportées sur les années suivantes.
En pratique
En pratique, les plus-values éligibles au régime des PVBM devront faire l’objet d’une déclaration rectificative le plus rapidement possible. En effet, ce régime impose de déclarer la plus-value réalisée et d’acquitter l’impôt correspondant dans le mois suivant la cession. Cependant, l’administration fiscale tiendra probablement compte des circonstances particulières de la situation. Ces plus-values devront par ailleurs être reportées sur la déclaration de revenus 2017.
Pour conclure, s’il est évident que cette décision n’aura que peu d’impact sur la fiscalité des cryptoactifs, elle aura le mérite de bénéficier à certains crypto-investisseurs et surtout de presser les pouvoirs publics d’adopter – enfin ! – un régime fiscal adapté…
Pour résumer
– Les gains occasionnels seront imposés sous le régime des PVBM.
– Les cryptoactifs reçues par les mineurs resteront imposés en BNC.
– Les gains habituels et résultant d’une intention spéculative resteront imposés en BIC.
Enfin, il convient de noter que le Conseil d’Etat qualifie expressément les cryptoactifs de biens meubles incorporels, ce qui rassure quant à la possibilité de bénéficier de l’abattement de 71 % en micro-BIC.
Pour aller plus loin : La décision du Conseil d’Etat – La doctrine administrative relative au régime des PVBM
A propos de l’auteur
En charge des activités fiscales de Blockchain Legal, Alexandre Lourimi est spécialiste des enjeux fiscaux liés aux cryptoactifs et aux ICOs. Membre d’associations professionnelles, il participe aux réflexions en cours sur l’évolution de la fiscalité et de la comptabilité applicables aux cryptoactifs.