Espace(s) monétaire(s) monnaies parallèles, crypto-monnaies et crises institutionnelles

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L’institutionnalisation des systèmes monétaires hiérarchisés et la gouvernance monétaire contemporaine. Conférence de Maël Rolland, doctorant à l’École des hautes études en sciences sociales.

Quand ? – Lundi 19 novembre 2018 de 17h00 à 19h00.

Où ? – EHESS – salle 3, 105 Boulevard Raspail à Paris.

« Cette séance entend présenter l’émergence heurtée et historiquement située, des architectures hiérarchisées des systèmes monétaires territorialisés permettant de cerner les cinq ressorts de la gouvernance monétaire contemporaine. La question d’une “bonne gouvernance monétaire” offre une place de choix aux questions relatives au statut de la monnaie et à ses effets. La question d’une monnaie neutre “en soi” y est centrale et elle interroge toujours l’opportunité de règles contraignantes publicisées et intangibles, permettant de la protéger des interférences politiques qui essayeraient de l’en détourner. Suivant des vagues de libéralisation financière et la résurgence d’une orthodoxie monétaire à partir des années 1970, dans le champ académique mais aussi politique, qualifiée de néolibéral, la théorie monétaire contemporaine comme ses praticiens, semble s’être entendue sur l’inefficacité à long terme des évolutions discrétionnaires de la masse monétaire et de l’impact de ces dernières sur la stabilité des prix. Les innovations financières, comme les monnaies de papier, par les frictions qu’elles engendrent, apparaissent comme les variables clefs de l’évolution des systèmes monétaires. Aussi, les sphères institutionnelles hétérogènes (privées) constituant l’espace monétaire (public) peuvent ébranler la stabilité et l’unicité de ce dernier, et impliquer de facto des interventions plus ou moins discrétionnaires des autorités centrales compétentes. Ces adaptations institutionnelles et politiques, particulièrement visibles lors d’épisodes de prêt en dernier ressort (PeDR), renseignent la tension ontologique traversant l’espace monétaire : le rapport dialectique des logiques individuelles à leur pendant collectif. L’existence de telles fiat monnaies, dont l’ancrage nominal repose dès lors sur un encadrement légal, soit en dernière instance sur les gouvernements, voit la gestion de la quantité de monnaie en circulation dévolue à une autorité centrale, qui en est l’émetteur ultime. Une attention particulière est accordée à “la bonne” quantité d’une monnaie qui, réputée exogène, devrait sa création aux seules BC, rendues responsable de l’inflation. Le bouclage de la structure monétaire et financière, de par les pratiques de marché, a rendu nécessaire un émetteur ultime, à la fois régulateur et superviseur. Mais du fait de l’absence de la contrainte exogène que faisait peser sur la politique monétaire la liaison au métal, et ses opérateurs, il devient impérieux d’avoir des règles précises, intangibles et publicisées les contraignant. De là émergent, théoriquement et pratiquement, pour les politiques monétaires comme pour les institutions qui les portent, les notions contemporaines d’“indépendance”, de “transparence” et de “crédibilité”. D’ailleurs, il est admis que face à des réseaux monétaires et financiers de plus en plus complexes, l’acte du PeDR, pour encadré qu’il soit, reste un outil discrétionnaire attestant de la bonne gouvernance des banquiers centraux, comme la crise de 2007 à encore pu le démontrer. Ici, un tel rôle met en exergue le rapport contradictoire entre logique d’innovation privée (ou semi-privée) et logique collective de maintien du système de paiement : la seconde se voyant obligée de recouvrir la première afin d’en apurer les déséquilibres. C’est bien alors au travers de ses crises que la monnaie révélera son être, dans toute sa dialectique. Les marques de sa présence ne se découvrant qu’à la lueur de son absence, de son assèchement. »

 

En savoir plus : ehess.fr – Présentation Générale du séminaire