Etats-Unis : Peter Van Valkenburgh face au Comité sénatorial des banques

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Traduction de l’audition de Peter Van Valkenburgh, directeur de recherche de Coin Center [1], qui a été entendu le 11 octobre dernier par le Comité sur la Banque, le Logement et les Affaires Communautaires du Sénat américain, à la suite de l’intervention très médiatisée de l’économiste Nouriel Roubini :

« Bitcoin, qu’est-ce que c’est ? C’est la première cryptomonnaie du monde qui fonctionne grâce au premier réseau mondial de blockchain publique.

A quoi sert Bitcoin ? C’est simple. Bitcoin permet à quiconque, n’importe où dans le monde, d’envoyer et de recevoir de la valeur en n’utilisant rien de plus qu’un ordinateur et une connexion Internet.

Pourquoi est-ce révolutionnaire ? Parce que, contrairement à tous les autres outils permettant d’envoyer de la valeur sur Internet, Bitcoin fonctionne sans qu’on ait à faire confiance à un intermédiaire.

L’absence de toute société privée intermédiaire signifie que Bitcoin est la première infrastructure de paiement numérique publique au monde. Et par public, je veux simplement dire ouvert à tous et n’appartenant pas à une seule entité.

Nous avons une infrastructure d’information publique pour les sites Web et la messagerie électronique, appelée Internet, mais notre seule infrastructure de paiement publique c’est le papier-monnaie, et ça ne fonctionne que pour les transactions en face à face.

Avant Bitcoin, si vous vouliez payer quelqu’un à distance, par téléphone ou par Internet, vous ne pouviez pas utiliser d’infrastructures publiques. Vous deviez vous reposer sur les registres d’une banque privée qui vous débite et crédite le destinataire. Et si vous n’utilisez pas la même banque, il y a plusieurs entrées et plusieurs registres entre vous deux.

Avec bitcoin, le grand livre c’est la blockchain publique et tout le monde peut ajouter une entrée à ce registre afin de transférer ses bitcoins à quelqu’un d’autre. Et n’importe qui, peu importe sa nationalité, sa race, sa religion, son sexe ou sa solvabilité, peut – sans aucun frais – créer une adresse Bitcoin pour pouvoir recevoir des paiements en ligne.

Bitcoin est la première monnaie publique en ligne universellement accessible.

Est-ce que Bitcoin est parfait ? Non. Comme pour le courrier électronique lorsqu’il a été inventé en 1972, Bitcoin n’est pas la monnaie la plus pratique. Il n’est pas encore accepté partout, il est rarement utilisé pour fixer les prix, et ce n’est pas une réserve de valeur très stable. Mais cela fonctionne, et le simple fait de fonctionner sans intermédiaires de confiance est incroyable. C’est une percée dans l’informatique aussi importante pour la liberté, la prospérité et l’épanouissement humain que la naissance d’Internet.

Et ce n’est que le début. Si nous pouvons remplacer les infrastructures de paiements privées, nous pouvons également envisager de remplacer par des interactions humaines d’autres infrastructures privées.

Pourquoi devrions-nous construire plus d’infrastructures publiques ? Pourquoi devrions-nous adopter des blockchains plutôt que des sociétés privées ? Pourquoi devrions-nous accepter le manque d’efficacité de ses blockchains et travailler à les améliorer ? Pourquoi serait-il souhaitable que les pionniers de cette technologie restent ici, aux États-Unis, et ne fuient pas à l’étranger ?

Une raison simple. Parce que les intermédiaires privés fournissant actuellement les infrastructures critiques sont de moins en moins nombreux, de plus en plus gros et de plus en plus puissants, et que leurs défaillances sont de plus en plus graves.

Près de la moitié des Américains, 143 millions, ont vu leur numéro de sécurité sociale exposé à des pirates informatiques à la suite d’une infraction à Equifax.

Le réseau SWIFT a relayé des centaines de millions de dollars de transactions frauduleuses de banques membres piratées au Bangladesh, au Vietnam, en Équateur et en Russie. Le FBI soupçonne aujourd’hui que le plus grand de ces piratages a été commis par la Corée du Nord.

Des employés corrompus d’une banque indienne, Punjab National, ont été capables de certifier frauduleusement des messages SWIFT et de dérober 1,8 milliard de dollars. C’est le plus grand vol électronique de l’histoire.

En octobre 2016, environ 1,2 million d’appareils connectés à Internet ont été piratés et transformés en botnet. Pendant plusieurs heures d’importants sites Web en Europe et en Amérique du Nord, notamment CNN, Fox News, le New York Times et le Wall Street Journal, ont été inaccessibles.

De plus en plus de machines sont connectées à Internet via à des serveurs appartenant à des intermédiaires privés : c’est l’Internet des objets. Les stimulateurs cardiaques de l’hôpital St.Jude ont été piratés. Les moniteurs des couveuses de TRENDnet ont été piratés. Et certains véhicules de Jeep ont été piratés, quelqu’un a réussi à les contrôler à distance et à les chasser de la route.

Ces vulnérabilités sont inhérentes aux systèmes qui souffrent d’un point de défaillance unique. Peu importe que ce point de fragilité soit une entreprise privée ou un gouvernement, il ne devrait pas y avoir de point de défaillance.

Des points de passage similaires existaient avant Internet, si vous vouliez transmettre un message, vous deviez passer par l’un des trois diffuseurs de télévision ou une poignée de journaux. Les entreprises privées sont essentielles, mais aucune infrastructure critique ne devrait dépendre entièrement d’une ou deux de ces infrastructures. Internet a supprimé les points de défaillance uniques des infrastructures de communication et a ouvert un marché concurrentiel pour les nouveaux médias construisant sur ces rails publics.

De la même façon, les blockchains pourraient désintermédier des paiements critiques et les infrastructures IOT. La technologie n’est pas encore prête aujourd’hui à répondre à tous ces questions, mais c’est notre meilleur espoir. Comme pour Internet dans les années 90, nous avons besoin d’une politique favorable à l’innovation afin de garantir que ces innovations se développent en Amérique pour le bénéfice et la sécurité de tous les américains.

Source : coincenter.org 

 


[1] Association indépendante à but non lucratif axée sur les questions de politique et de règlementation liées aux blockchains publiques et aux cryptomonnaies.