Bitcoin, une citadelle assiégée ?

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En 2008, Satoshi Nakamoto, figure énigmatique, publie le livre blanc de Bitcoin, lançant une révolution financière décentralisée. Au cœur de sa vision : la vie privée, un principe fondamental pour celui qui a su, jusqu’ici, préserver son anonymat. Mais qu’en est-il aujourd’hui, en 2025, alors que la citadelle Bitcoin fait face à un encerclement réglementaire ?

La vie privée selon Satoshi

Dans son livre blanc, Satoshi écrivait : « La confidentialité peut être maintenue […] en gardant les clés publiques anonymes ». Le pseudonymat devait permettre aux utilisateurs de réaliser des transactions sans révéler leur identité, tout en enregistrant celles-ci sur un registre public. Satoshi recommandait également d’utiliser une nouvelle paire de clés pour chaque transaction afin d’éviter tout lien entre elles. Il mentionnait même l’usage de TOR pour renforcer la confidentialité, conscient des limites potentielles de Bitcoin.

Cette vision découlait d’une philosophie libertaire, où la décentralisation et la liberté individuelle primaient. Satoshi voyait Bitcoin comme un moyen d’échapper au contrôle des institutions financières, offrant une alternative où la vie privée était protégée des l’indiscrétion des tiers de confiance.

À ses débuts, Bitcoin semblait tenir sa promesse. Les adresses pseudonymes offraient un certain degré d’anonymat, et la blockchain garantissait la transparence sans révéler directement les identités. Cependant, Satoshi lui-même reconnaissait des failles : les transactions multi-entrées pouvaient révéler des liens entre adresses, compromettant la confidentialité. Malgré ces avertissements, l’anonymat de Bitcoin était perçu comme robuste à l’époque, en grande partie car les outils d’analyse n’existaient pas encore.

Les défis contemporains : la confidentialité mise à l’épreuve

En 2025, la réalité est bien différente. Des outils d’analyse de chaine, comme ceux développés par Chainalysis, permettent de retracer les transactions et assez souvent de les relier aux données détenues par des plateformes d’échange centralisées et régulées. L’analyse de données par IA facilite encore davantage ce travail. Par ailleurs, les régulateurs exercent une pression croissante, rendant la vie privée plus difficile à maintenir. La multiplication de bases de données mal protégées qu’on peut facilement croiser avec les données publiques du registre Bitcoin met parfois physiquement les utilisateurs en danger.

Au fil du temps, des solutions ont néanmoins émergé pour atténuer les risques encourus par tous ceux qui ont été contraints de confier de précieuses informations personnelles à des entreprises privées :

  • CoinJoin, par exemple, combine plusieurs transactions pour masquer leur origine, améliorant ainsi leur confidentialité. Cependant, le protocole CoinJoin ne servant qu’à cela, son utilisation pourrait susciter une présomption de comportement suspect.
  • Le Lightning Network, conçu avant tout pour permettre des micro-transactions rapides et peu chères, n’a pas cet inconvénient. En traitant les transactions hors chaîne, il ne laisse sur le registre public que les transactions d’ouverture et de fermeture de canaux.
  • Enfin, la mise à jour Taproot de 2021, avec ses signatures Schnorr, rend les transactions complexes indiscernables des transactions simples, renforçant la vie privée.

Mais la meilleure protection serait évidemment de ne jamais passer par une plateforme centralisée et de privilégier le pair à pair de bout en bout (de l’acquisition à la dépense). Cette pratique est cependant très marginale.