Selon certaines estimations, la puissance de calcul du réseau Bitcoin aurait ponctuellement dépassé les 100 000 000 TH/s, soit une augmentation de 100% en un an seulement. Pour comprendre ce phénomène nous nous sommes tournés vers Sébastien Gouspillou, cofondateur et Président de BigBlock Datacenter, société nantaise qui conçoit et gère à travers le monde des unités dédiées au « minage » [1] de bitcoins :
« Après une chute de 30% en décembre 2018 (souvenez-vous, certains nous annonçaient une spirale de la mort), comme prévu, les cartes ont été redistribuées, les asics débranchés ont été rebranchés ailleurs ; le hashrate a recouvré mi mai 2019 son niveau de novembre. Après, les nouveaux asics sont arrivés ; ces doubles asics à la performance énergétique très supérieure ont permis a des fermes avec un jus au dessus de 6cts de redevenir rentables ; et on a vu le hashrate remonter en flèche, jusqu’à toucher les 100 000 000 THs ! 40 000 000 de plus qu’au pic précédent (août 2018), environ 700 000 asics nouvelle génération.«
Bitcoin.fr : A-t-on une idée des zones géographiques où ses nouvelles machines s’implantent ?
« Il est difficile de le dire : les zones où le jus est le moins cher ne se sont pas ruées sur ces nouvelles machines, les S9 restant rentables ; en revanche, beaucoup de pays ont pu revenir dans la course avec de telles performances ; La Sibérie, par exemple, avec un jus à USD 5,5 cts, a bien sûr importé des masses de S17 ou équivalent.
Pour notre part, à l’arrivée de ces nouvelles générations, nous avons modifié les plans de notre ferme Hashlabs 1 prévue pour 4000 S9 ; dorénavant, c’est 3000 S9 et 300 S17 ; et nous savons que la prochaine unité ne comportera sans doute que des machines nouvelle génération.
Il faut préciser que Bitmain n’arrive pas à fournir, tout le monde voit les retards de livraison s’accumuler ; d’autres acteurs produisent des matériels équivalents : Whatsminer, Innosilicon, Canaan et plein de petits assembleurs.
Bitcoin.fr : Comment expliquer cet optimisme des mineurs ?
« Cette poussée du hashrate ne traduit pas juste une confiance aveugle des mineurs en une augmentation considérable du prix à court terme, comme j’ai pu le lire : elle consacre surtout l’arrivée de nouveaux investisseurs, de plus en plus gros, qui cherchent à tout prix à diversifier et achètent de l’or et du bitcoin, des actions de mines d’or et des parts de fermes BTC. Et tant que la finance traditionnelle présentera des signes aussi forts de récession à venir, voire de crise financière globale, ce mouvement s’amplifiera. La rentabilité des mines avec un tel hashrate constaté a beau baisser, ça laisse encore des perspectives de profit qui semblent hallucinantes aux investisseurs, désormais inquiets de voire leur épargne se déprécier. Attendez-vous donc à voir le Hashrate continuer à augmenter dans les semaines qui suivent, sauf à enregistrer une forte baisse du cours du BTC.
Bitcoin.fr : Concernant les activités de BigBlock, où en est aujourd’hui le chantier d’Almaty [2] ?
Notre ferme a une ouverture désormais prévue début novembre. Nous avons connu des contretemps successifs : le nouveau gouvernement a changé quelque peu la donne d’approvisionnement en électricité ; notre grossiste local en matériel électrique a déposé le bilan ; le chantier n’a plus été alimenté en électricité en juillet et août. Bref, les retards se sont accumulés, le bâtiment se termine enfin.
[1] Le minage c’est le procédé par lequel les transactions Bitcoin sont sécurisées. A cette fin les mineurs effectuent des hashs cryptographiques (deux SHA256 successifs) sur les blocs de transactions qu’ils composent. Le premier mineur qui trouve un hash inférieur à une difficulté cible remporte les nouveaux bitcoins émis ainsi que l’ensemble frais de transactions collectés dans le bloc. La difficulté est ajustée tous les 2016 blocs pour maintenir une moyenne de dix minutes entre deux blocs.
[2] Construction d’une ferme de « minage » située près d’un barrage hydroélectrique non loin d’Almaty au Kazakhstan.