Bitcoin au pilori

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Michel Castel, ex-cadre de la Banque de France et ancien enseignant en sciences économiques, a publié hier sur son blog et sur lesechos.fr un article intitulé « Financement du terrorisme : les dérives des monnaies virtuelles ».  Il y dénonce « l’inconséquence » et « l’irresponsabilité » des autorités qui auraient laissé, avec Bitcoin, « se propager librement un risque majeur […] pour la sécurité publique ».

Extrait :

« Que d’inconséquences : on a laissé consciemment se propager librement un risque majeur et après on va essayer d’en contenir les effets les plus dévastateurs !! C’est affligeant. Quand on pense qu’on veut élargir considérablement le champ des circuits de face à face, à l’instar du bitcoin, pour éviter de passer par des acteurs régulés et surveillés et que des pays envisagent de supprimer à terme (peu éloigné) et cadastres et notaires parce que la chaîne des ordinateurs serait un garant tout aussi efficace qu’eux mais beaucoup moins chers, c’est totalement irresponsable. En ces matières, la course à la technologie pour la technologie, la concurrence folle entre pays et acteurs économiques pour gagner quelques centimes sur des transactions et le pari sur la transparence de ces opérations qui serait la panacée universelle, sont autant de leurres. Arrêtons ces dérives avant qu’il ne soit trop tard, essentiellement pour la sécurité publique, mais aussi à terme proche pour le bon fonctionnement des systèmes des paiements et la sécurité des actes juridiques dont ceux touchant le droit de propriété ». – Michel Castel.

Certains mauvais esprits diront qu’on aurait pu tout aussi bien, et avec sans doute beaucoup plus d’éléments à charge, intituler ce billet « Financement du terrorisme : les dérives des monnaies fiduciaires nationales », arguant que les billets de banque – anonymes et intraçables – émis par des banques centrales (notamment la Banque de France) et libellés en euros, en dollars, en livres syriennes ou turques, contribuent vraisemblablement de façon beaucoup plus massive et certaine au financement le terrorisme… mais là n’est pas le propos, d’autres ont répondu mieux que moi à ces accusations (lire cet article de Superresistant et celui de Jacques Favier).

Je ne discute donc pas du bien-fondé du diagnostic, mais du sens et de l’efficacité du remède : « Cessons ces dérives […] Arrêtons ces dérives ».

Qu’est-ce que cela signifie ? Le seul moyen efficace d’empêcher l’utilisation de Bitcoin (ou d’Ethereum) c’est de couper Internet. En l’absence d’une mesure aussi extrême, on pourra tout au plus empêcher les entreprises situées sur le territoire européen d’utiliser légalement ces technologies. Ça, en effet, c’est possible. Mais à quoi bon ? Ça mettra l’Europe, une fois de plus, en dehors de la course et laissera le champ libre aux firmes étrangères qui s’empareront aussitôt des marchés vacants (Internet n’a pas de frontière) et au final ça ne fera de tort qu’aux entreprises honnêtes sans nuire aucunement à ceux qui se moquent de la loi.


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